Superficies trompeuses : que faire ?

La plupart des acheteurs accordent une grande importance au rapport superficie/prix d’un appartement. Par conséquent, avant de signer l’acte de vente, prenez le temps de mesurer soigneusement la superficie de votre unité. Les écarts entre ce qui était prévu au plan remis lors de la signature du contrat préliminaire, versus la superficie réelle illustrée dans le plan de cadastre ou le certificat de localisation, sont fréquents. Cette différence s’explique par moult facteurs qui sont énumérés dans la fiche pratique intitulée La superficie de la partie privative.

 

Déficit de contenance de l'immeuble

L’article 1720 du Code civil du Québec balise les droits d’un acheteur, advenant que la différence de superficie d’un appartement joue en sa défaveur. Cet article stipule que : « Le vendeur est tenu de délivrer la contenance ou la quantité indiquée au contrat, que la vente ait été faite à raison de tant la mesure ou pour un prix global, à moins qu'il ne soit évident que le bien individualisé a été vendu sans égard à cette contenance ou à cette quantité. » Or, le déficit de superficie constitue un défaut de contenance au regard de l'espace vendu.

De plus, les tribunaux, dont la Cour d’appel du Québec, ont conclu que dans le cas où les dimensions d’un appartement en copropriété divise (fournies par le bureau des ventes) ne sont pas conformes à la réalité, le vendeur se livrait à une pratique interdite au sens de la Loi sur la protection du consommateur (LPC). L'article 221 de la LPC indique qu'aucun commerçant ne peut faussement attribuer à un bien une dimension ou une mesure.

Comment se protéger contre ce type de problème?

Il est préférable de déterminer préalablement, dans le contrat préliminaire, les conséquences d’un déficit de contenance. Vous pourrez ainsi soit convenir d’une méthode de réduction du prix de vente, soit indiquer un seuil au-delà duquel vous serez en droit de vous retirer de l’achat sans  conséquences.

Déficit de contenance : que faire?

Lorsqu’un contrat préliminaire mentionne une superficie erronée, et qu’aucune entente à l’amiable n’a été conclue avec le promoteur, l’acheteur peut choisir entre l’un des deux options suivantes:

  • Il accepte de signer l'acte de vente en précisant au vendeur qu’il se réserve tous droits et recours afin d’être indemnisé, par le fait du déficit de contenance ; 
  • Il refuse de signer l'acte de vente en précisant au vendeur que son consentement a été vicié, en raison des fausses représentations dont il a été victime.

Droits et recours

Sans mention expresse au contrat préliminaire  précisant que la superficie de l’appartement mentionnée est une condition essentielle  à l’engagement de l’acheteur, il appartient à ce dernier, en principe, de prouver qu’il n'aurait pas contracté. Or, l'article 253 de la LPC vient atténuer le degré de preuve, en cette matière, pour toute personne physique ayant conclu un contrat avec un commerçant dans le cadre des activités de son commerce. Cette disposition prévoit que lorsqu'un commerçant, fabricant ou publicitaire se livre  à une pratique interdite pendant la vente d’un immeuble, il y a dès lors présomption que si le consommateur avait eu connaissance de cette pratique, il n'aurait pas contracté ou n'aurait pas payé un prix si élevé. De plus, en matière de contrat de consommation, le contrat doit être interprété en faveur du consommateur.

Recours en diminution du prix de vente

Bien que le différentiel entre la superficie brute annoncée et la superficie nette de la partie privative puisse être facilement établi, l’indemnité demeure un exercice laborieux et complexe. La règle de trois ou proportionnelle n’a pas été retenue par les tribunaux comme calcul d’indemnisation. Si l’appartement a une superficie moindre de 20%, la réduction du prix de vente ne sera pas déterminée selon ce pourcentage. Les indemnités accordées par les tribunaux ont été bien souvent parcimonieuses dans le passé. On peut toutefois noter une évolution dans la jurisprudence récente.

Dans un jugement rendu en avril 2017, la Cour supérieure a condamné un promoteur à verser une indemnité de 113 000 $ pour un déficit de contenance représentant 12 % de la superficie totale vendue, en dépit d’une disposition dans la promesse d’achat stipulant que le prix  demeurerait le même, malgré une divergence de superficie par rapport à celle mentionnée dans les plans préliminaires. Ce jugement laisse entrevoir une meilleure prise en compte, par les tribunaux, de la situation des acheteurs qui se retrouvent avec une unité plus petite que celle qu’ils croyaient avoir acquise.

Recours en résiliation du contrat préliminaire

Suivant les circonstances, la vente pourrait en principe être annulée à la demande de l’acheteur. Il faudra toutefois faire la preuve du défaut, ainsi que du fait que la superficie de l’immeuble était une considération essentielle pour l’acheteur. Précisons qu’un défaut de contenance n’entraîne  pas automatiquement l’annulation de la vente, voire une diminution du prix, lorsque les différences de contenance sont négligeables.

 

BON À SAVOIR !​ L’article 1458 du Code civil du Québec stipule que toute personne a le devoir d'honorer les engagements qu'elle a contractés. Le fait qu’un contrat préliminaire indique une superficie «approximative» n'exonère pas un promoteur (sans réserve) de son obligation de délivrer la contenance qui y est indiquée.

https://www.condolegal.com/images/Boutons_encadres/A_retenir.pngÀ RETENIR :​​ Le vendeur est tenu de délivrer la contenance indiquée au contrat, à moins qu'il ne prouve que le bien ait été vendu sans égard à cette contenance. La superficie de l’appartement doit figurer dans le contrat préliminaire. L’obligation légale du vendeur est de livrer un immeuble dont la superficie est conforme à ce qui est indiqué au contrat.

ATTENTION !​ Le recours en réduction du prix de vente n’a pas pour objet d’enrichir l’acheteur aux dépens du vendeur. L’indemnité doit être raisonnable, eu égard aux circonstances particulières de son dossier.

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