Date de publication: 29/10/2024

Échange de logements : que dit la déclaration de copropriété?

De nombreux sites internet valorisent aujourd’hui les échanges de logements résidentiels entre propriétaires, offrant ainsi une solution attrayante pour maximiser l’usage de son bien. Que vous envisagiez un échange réciproque avec un autre propriétaire ou un échange basé sur des « Points d'hospitalité » – appelés « GuestPoints » sur certaines plateformes en ligne – il est essentiel de prendre en compte plusieurs aspects juridiques.

L'échange d’un logement résidentiel, dans le cadre d'un échange réciproque, n’est généralement pas assimilé à une activité commerciale, tant que certaines règles sont respectées. Bien entendu, le tout dépend des termes inscrits dans la déclaration de copropriété. Toutefois, une distinction doit être faite entre les deux types d’échanges les plus courants, car leurs implications juridiques peuvent différer. Ces options sont décrites en détail ci-dessous.

ÉCHANGE RÉCIPROQUE SANS COMPENSATION 

L’échange temporaire d’unités entre propriétaires, sans compensation financière, constitue un contrat à titre gratuit et est qualifié de prêt à usage selon l’article 2313 du Code civil du Québec. Cette option attire les copropriétaires souhaitant voyager tout en réduisant les frais d’hébergement. Cependant, certaines précautions s’imposent 


1. Destination de l’immeuble et activités commerciales :
L’article 1053 du Code civil du Québec énonce que la destination de l’immeuble est définie dans l’acte constitutif de copropriété. Si l’immeuble a une vocation résidentielle, il est important de s’assurer que l’échange de logements ne soit pas perçu comme une activité commerciale, ce qui irait à l’encontre de cette destination. Comme l’échange réciproque n’implique pas de contrepartie financière, il est généralement considéré comme un prêt à usage et non une activité commerciale.

2. Durée minimale d’occupation et autorisations d’occuper :
Le règlement de l’immeuble établit les règles concernant la jouissance et l’usage des parties privatives, conformément à l’article 1054 du Code civil du Québec. Il est donc important de consulter cette section de la déclaration de copropriété pour vérifier si une durée minimale d’occupation s’applique aux échanges temporaires, comme, par exemple, trois semaines. La déclaration peut aussi contenir des règles spécifiques pour l’occupation temporaire ou les échanges d’unités, même si elles visent surtout la location. Il convient de s’assurer que l’échange respecte les règles en vigueur.

3. Notification au syndicat :
En vertu de l’article 1065 du Code civil du Québec, le syndicat doit être informé dans les 15 jours suivant la conclusion de l’entente, avec des informations telles que le nom de l’occupant, la durée de l’occupation, et la date de réception du règlement d’immeuble par l’occupant.

ÉCHANGE AVEC POINTS D'HOSPITALITÉ  

Selon cette formule, l’échange n’est pas réciproque. Un copropriétaire (ou un tiers) séjourne dans le logement d’un autre et, au lieu de rendre la pareille en occupant le logement du premier, il offre des Points d'hospitalité (GuestPoints). Ces Points d'hospitalité, gagnés en accueillant des invités ou par des promotions, permettent au propriétaire hôte de profiter ultérieurement d’un séjour dans une autre logement. Ce système de points, basé sur une contrepartie virtuelle, rend l’échange d'appartements plus flexible et est proposé sur des plateformes web spécialisées, facilitant les séjours même en l’absence d’échange direct. Bien que cela présente une solution pratique, il faut être attentif à certaines considérations :

1. Destination de l’immeuble et activités commerciales :

L’utilisation des Points d'hospitalité, bien qu’elle ne constitue pas un paiement financier direct, est considérée comme une transaction commerciale, car elle repose sur une contrepartie en points virtuels qui permet d’accéder à d’autres séjours. Dans une copropriété à vocation strictement résidentielle, cette pratique contrevient à la destination résidentielle fixée dans l’acte constitutif de copropriété. En effet, l’échange de nuitées par le biais de Points d'hospitalité introduit une dimension commerciale, incompatible avec l’usage exclusivement résidentiel de l’immeuble.

2. Durée minimale d’occupation :

Comme pour l’échange réciproque, il est essentiel de respecter les règles du règlement d’immeuble, surtout lorsque la déclaration de copropriété interdit toute location de moins d’un an. Dans ce contexte, un séjour de courte durée, même en utilisant des Points d'hospitalité, ne serait pas conforme aux règles, car il est assimilé à une occupation temporaire incompatible avec l’usage strictement résidentiel prévu pour l’immeuble.

3. Réglementation sur les autorisations d’occuper :

La déclaration de copropriété peut contenir des règles précises l’occupation temporaire, qui peuvent limiter le nombre de séjours par an, encadrer les modalités d’accueil des invités, ou restreindre l’accès aux installations communes pour les occupants temporaires. Il est donc essentiel de consulter attentivement ces dispositions pour s’assurer que l’échange avec des Points d'hospitalité respecte bien les exigences.

4. Notification du syndicat :

Il est important de respecter l'article 1065 du Code civil du Québec, qui impose de notifier le syndicat dans les 15 jours suivant une entente d’occupation, car cela permet au syndicat de s’assurer que les résidents temporaires connaissent et respectent les règles de l’immeuble. Par exemple, si un copropriétaire accueille un invité pour un séjour de deux mois en échange de Points d'hospitalité, il doit transmettre au syndicat le nom de l'occupant, la durée de son séjour, et confirmer que cet occupant a reçu une copie du règlement de l’immeuble. Cette démarche est importante pour éviter des nuisances ou des malentendus et pour garantir que l’occupant respecte le mode de vie établi pour l’immeuble, protégeant ainsi le cadre de vie des autres copropriétaires.

Conclusion
À ce jour, la jurisprudence ne s’est pas prononcée, à notre connaissance, sur des situations d’échange via des plateformes de type HomeExchange. Cependant, qu’il s’agisse d’un échange réciproque ou d’un échange avec des Points d'hospitalité, il est essentiel de respecter la destination de l’immeuble, les règles de durée d’occupation et la notification au syndicat. La différence principale réside dans la nature de l’échange avec des Points d'hospitalité, qui peut soulever des questions sur la présence d’une activité commerciale. De plus, selon la durée d’occupation de l’unité, l’échange pourrait également être prohibé par le règlement d’immeuble.

 

Yves Joli-Coeur, Ad. E. 
Avocat
Dunton Rainville
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Laval, QC H7T 0J3
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