Date de publication: 11/10/2018
Copropriétés en difficulté : le Québec s'inscrira-t-il dans la tendance française?
11 octobre 2018 — Les copropriétés québécoises et françaises ne se ressemblent en rien sur le plan historique. Néanmoins, les rapprochements sont inévitables en matière d’entretien et de conservation du patrimoine bâti. La France compte environ 100 000 copropriétés délabrées à l’heure actuelle, voire insalubres et sur le point d’être inhabitables. Qu’en est-il du Québec sur cette question?
Plusieurs observateurs estiment que chez nous, le phénomène des copropriétés en difficulté est en émergence. Le déficit d’entretien en est la principale cause. Par conséquent, les pouvoirs publics devront éventuellement s’en mêler. Bien que les condos relèvent de la sphère privée, l’État ne pourra pas laisser se dégrader un segment du parc immobilier résidentiel en copropriété, dont la précarité pourrait faire craindre le pire.
La France est débordée
La France en a plein les bras, car confrontée à plusieurs grands ensembles en copropriété fragilisés. Elle a déjà investi des centaines de millions d’euros pour les réhabiliter. Mais plus le gouvernement français intervient, plus il constate l’ampleur titanesque d’une situation intenable.
« Les copropriétés en difficulté restent, pour le moment, un dossier quasi insoluble en France », écrivait France Inter le 9 octobre dernier. Plusieurs acheteurs de condos contribuent à alimenter cette spirale infernale, qui suit presque toujours le même modèle : des familles modestes ou très modestes parviennent, tant bien que mal, à acheter un appartement dans un quartier en difficulté. Mais des travaux imprévus et un ou deux mauvais payeurs peuvent tout faire basculer.
Des frais de condo qui explosent
Pour peu que l’immeuble soit en mauvais état, les charges communes (frais de condo) explosent. Les copropriétaires les plus pauvres sont dès lors pris dans un engrenage, car ils ne peuvent plus payer. Ces charges pèsent alors sur les autres propriétaires. Mais les retards de paiement s’accumulent, et en prime, la détérioration du bâtiment se poursuit. Or, plus il se détériore, plus les travaux deviennent lourds et coûteux. Au final, les condos se déprécient, quand ils ne deviennent pas tout simplement invendables.
Pour venir à bout du phénomène, le gouvernement français octroiera une enveloppe de 2,7 milliards d’euros, ainsi que de nouveaux outils juridiques pour accélérer le sauvetage des copropriétés dégradées. Plusieurs options sont sur la table : les redresser, les démolir ou transférer certains immeubles vers le logement social. Parmi d’autres mesures figurent la prise en charge de 100 % des travaux d’urgence, par exemple la réparation des ascenseurs et des toitures, sans oublier la mise aux normes du volet sécurité incendie.
Un sixième des copropriétés a basculé vers la précarité en France. Il s'en trouve plusieurs pour dire que les copropriétés qui se désagrègent, dans ce pays, sont devenues un gouffre sans fonds sur le plan financier. L’Association des responsables de copropriété (ARC) estime, pour sa part, qu’endiguer les situations urgentes est loin d’être suffisant. « C’est un plan d’accompagnement et de prévention beaucoup plus important qui est aujourd’hui nécessaire, affirment ses dirigeants. Là, le gouvernement ne s’attaque qu’au problème des grands brûlés. C’est nécessaire. Mais pas suffisant. »
Montréal, 11 octobre 2018
Par François G. Cellier et France Inter