Date de publication: 04/06/2022

Projet de loi 96 et langue française : nouvelles obligations en matière de copropriété divise

4 juin 2022 — Le projet de loi 96 (Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français) a (PL 96) été adopté le 24 mai dernier par l’Assemblée nationale du Québec (Vote : Pour 79, Contre 29, Abstention 0) et sanctionné le 1er juin 2022. Ce projet de loi modifie une vingtaine de lois et règlements, dont le Code civil du Québec. Il constitue une modification majeure à la Charte de la langue française (Loi 101) qui avait été adoptée en 1977. Le PL 96 propose ainsi diverses modifications législatives dans plusieurs secteurs d’activités, à savoir celles relatives à l’État québécois et à la société en général. Son objectif vise la protection et la valorisation de la langue française.

Nouvelle version de l’article 1060

Au cœur de ce remue-ménage linguistique figure la copropriété divise, qui voit l’article 1060 du Code civil du Québec se lire comme suit : 

 « La déclaration, ainsi que les modifications apportées à l'acte constitutif de copropriété et à l'état descriptif des fractions, sont présentées exclusivement en français au bureau de la publicité des droits. La déclaration est inscrite au registre foncier, sous les numéros d'immatriculation des parties communes et des parties privatives; les modifications ne sont inscrites que sous le numéro d'immatriculation des parties communes, à moins qu'elles ne touchent directement une partie privative. Quant aux modifications apportées au règlement de l'immeuble, elles doivent l’être de manière expresse, dans un procès-verbal ou une résolution écrite des copropriétaires, et il suffit qu’elles soient déposées au registre tenu par le syndicat conformément à l’article 1070. Ces modifications doivent être apportées exclusivement en français. »

Les modifications au texte de Loi sont surlignées en jaune

Toutefois, il est encore permis de présenter au bureau de la publicité des droits un acte qui modifie ou corrige une déclaration de copropriété qui avait été rédigée en langue anglaise et publiée avant la sanction du PL 96 (1er juin 2022). Pour plus de précisions sur cette modification, nous vous invitons à lire les commentaires de Condolegal sur l'article 1060

Contrat préliminaire et note d'information (en français)

L'article 55.1 de la Charte de la langue française prévoit dorénavant que le contrat préliminaire et la note d'information doivent être rédigés en français, à moins que la volonté expresse des parties ne soit de contracter dans une autre langue. Cette volonté expresse des parties peut être exprimée dans une clause explicite du contrat et des documents connexes. Rappelons que le contrat préliminaire est l'avant-contrat par lequel le constructeur d'un immeuble ou un promoteur s'oblige à vendre, à une personne physique qui l'acquiert pour l'occuper elle-même, un immeuble à usage d'habitation bâti ou à bâtir. Il prévoit notamment le prix et les conditions auxquelles aura lieu la vente. La note d'information complète le contrat préliminaire. Elle doit être remise à l'acheteur par un constructeur ou un promoteur, lorsque la vente porte sur une fraction de copropriété divise d’un immeuble à usage d’habitation.

Registre et documents de la copropriété

La loi stipule que le syndicat doit tenir un registre à la disposition des copropriétaires et communiquer divers documents aux copropriétaires dans le cadre de l’administration de la copropriété (par ex. les avis de convocation à l’assemblée de copropriétaires). L'article 1070.1.1., introduit au Code civil du Québec par le PL 96, prévoit dorénavant que les documents composant le registre et ceux qui sont transmis aux copropriétaires devront être rédigés en français. Cette nouvelle disposition, reproduite ci-dessous, vient ainsi obliger tout syndicat de copropriétaires à l’emploi de la langue française dans l’administration d’une copropriété.

1070.1.1. Le registre et les documents tenus à la disposition des copropriétaires ainsi que tout document rédigé par le syndicat à l’intention d’un copropriétaire doivent être rédigés en français.

L’Office québécois de la langue française veille à l’application du premier alinéa comme s’il s’agissait d’une disposition de la Charte de la langue française (chapitre C-11). 

Sanctions pénales

À la suite de l’adoption de la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français, les sanctions pénales pour une infraction à celle-ci seront revues à la hausse. Les amendes en cas de violation de la Loi se situent maintenant entre 700 $ et 7 000 $ pour les personnes physiques et entre 3 000 $ et 30 000 $ pour les personnes morales. Les montants minimal et maximal de ces amendes prévus sont portés au double pour une première récidive et au triple pour toute récidive additionnelle. Des amendes supplémentaires s’appliqueront pour chaque journée où l’infraction se poursuit. En outre, les dirigeants et administrateurs d’une personne morale ou d’un autre groupement (quelle qu’en soit la forme juridique) verront leurs amendes doublées par rapport au montant visant les particuliers.

Sanctions civiles

Diverses sanctions civiles sont prévues dans la Loi. Il en est ainsi dans le cas d’un contrat d’adhésion ou d’un contrat de consommation. Toute clause qui n’est pas rédigée en français sera réputée incompréhensible, à moins que le contrat n’ait été rédigé dans cette autre langue à la demande expresse de l’adhérent..

 

Par Me Yves Joli-Coeur pour Condolegal.com

Montréal, 4 juin 2022