18 octobre - Congédier un employé devenu célibataire risque de coûter cher à un employeur, si l'on se fie à une décision rendue le 3 septembre 2013 par la Commission des relations du travail. L'histoire dont il est question concerne des immeubles à logements locatifs, mais elle pourrait aussi s'appliquer à des copropriétés.
Serge V. et sa conjointe ont été embauchés en 2005 à titre de couple concierge dans une tour d'habitations. Ils vivaient dans le même appartement et se partageaient différentes tâches. Elle s'occupait du renouvellement des baux et percevait les loyers, tandis que lui était affecté à l'entretien ménager et aux réparations mineures de l'immeuble. Mais leur relation a pris fin en 2007, mettant ainsi leur poste en péril, l'employeur préférant embaucher des couples concierges.
Qu'à cela ne tienne, les ex-conjoints ont maintenu leur emploi, à la différence qu'ils ne vivaient plus dans le même appartement. Serge V. a été muté au sein d'une équipe volante et accomplit les mêmes tâches dans d'autres édifices. De son côté, son ex-concubine a cumulé les mêmes fonctions, avant d'être remerciée quelque temps plus tard. Par la suite, Serge V. est retourné travailler dans son immeuble d'origine, et a lui aussi été "licencié" (le 13 août 2012), en raison de l'embauche d'un autre couple concierge dans ce même édifice, et d'une rationalisation des effectifs. Serge V. a contesté ce licenciement qui ne reposait sur aucun motif valable, et qui, selon lui, allait à l'encontre des principes éditcés par la Charte des droit et libertés de la personne.
Dans son jugement, la Commission a mis en lumière que Serge V. a travaillé plusieurs mois dans l'immeuble pour lequel il avait été initialement embauché, même s'il était devenu célibataire. "Dans notre affaire, nous sommes en présence d’une politique générale qui ne peut se justifier. La séparation, le divorce ou le statut de célibataire ne peuvent constituer un motif de fin d’emploi", tranchera la Commission.
En d'autres termes, un employeur ne peut exiger qu'un salarié vive en couple pour pouvoir travailler, que ce soit par les liens du mariage ou en union libre. Bien que cette politique était connue du personnel concerné, cela ne la rendait pas licite pour autant. La Commission a donc conclu que Serge V. n'avait pas été licencié, mais bien congédié. Par conséquent, le plaignant a obtenu réparation. Morale de cette histoire: les syndicats de copropriétaires doivent faire preuve de discernement en pareille situation, afin d'éviter des pénalités financières coûteuses, et d'accoler une mauvaise réputation à leur copropriété.
Montréal, le 18 octobre 2013