Date published: 15/06/2022

Lieux et heures de constatation

15 juin 2022- Le constat d'huissier se révèle être un outil inestimable, garantissant une impartialité et une précision inégalées dans la documentation des faits. Cette démarche méticuleuse et rigoureusement définie assure non seulement la légitimité et la fiabilité des constatations réalisées par les huissiers mais contribue également à la protection des droits et à l'administration équitable de la justice. Dans le cadre d'un constat d'huissier de justice, quelles règles s'appliquent pour les lieux et heures de constatation?

Constatations dans les copropriétés

L'huissier de justice jouit de la liberté de réaliser des constatations dans les parties communes des copropriétés avec l'autorisation nécessaire du syndicat des copropriétaires, tandis que l'accès aux unités de logement requiert le consentement explicite du copropriétaire. La loi prévoit des mécanismes de protection pour éviter toute atteinte aux droits et libertés fondamentaux lors de ces opérations.

L’article 3 du Code civil du Québec (C.c.Q.) se lit comme suit :

Article 3Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels le droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée.  Ces droits sont incessibles.

Les articles 5, 7, et 8 de la Charte des droits et libertés de la personne se lisent comme suit :

Article 5Toute personne a droit au respect de sa vie privée.

Article 7La demeure est inviolable.

Article 8Nul ne peut pénétrer chez autrui ni y prendre quoi que ce soit sans son consentement exprès ou tacite.

L’huissier de justice peut procéder à toutes sortes de constatations sur les parties communes intérieures et extérieures d’une copropriété avec autorisation du conseil d'administration ou de n'importe quel copropriétaire.

Le pouvoir judiciaire et les exceptions

À l’intérieur d’une partie privative, dans une partie commune à usage restreint (lieu d’entreposage situé dans un garage, etc.), le consentement au préalable du copropriétaire est obligatoire. Le législateur a prévu des textes de loi très clairs à cet effet. L’article 2858 C.c.Q. prévoit en effet que le tribunal doit, même d’office, rejeter tout élément de preuve obtenue dans des conditions qui portent atteintes aux droits et libertés fondamentaux.

En revanche, un juge a le pouvoir d’autoriser l’accès à l’intérieur d’une unité de condo pour les motifs qu’il juge appropriés. Dans ce cadre, l’huissier de justice instrumentant doit observer et respecter l’intégralité des dispositions de ladite ordonnance. Dans les faits, il est très rare que ce type d’ordonnance soit rendue. Le procureur d’un syndicat ou conseil d’administration aura l’obligation de présenter une requête à cet effet.

Toutefois, de consentement avec le(s) copropriétaire(s) concerné(s), l’huissier de justice peut pénétrer à l’intérieur d’une unité de condo à toutes heures et durant les jours non-juridiques.

En ce qui concerne les parties communes, tels les stationnements, le hall d’entrée, les corridors, l’huissier de justice accompagné d’un administrateur, d'un gestionnaire, ou du copropriétaire, aura le pouvoir de procéder à l’exécution de son acte de constat, à n’importe quelle heure, y compris un jour non-juridique. Rappelons tout de même que tout cela se fait contrairement aux dispositions de l’article 581 du Code de procédure civile (C.p.c.) qui prévoit qu’une saisie ne peut être pratiquée un jour non-juridique, ni entre 20h00 et 07h00 (sauf exception) et de l’article 141 C.p.c. qui prévoit qu’aucune signification ne peut être faite sous peine de sanction contre l’officier instrumentant avant 07h00 ni après 22h00.

L’huissier de justice doit décliner ses nom, prénom, sa qualité et les motifs de sa présence.  Il ne peut intervenir de façon "incognito" à l’intérieur de l’unité privée d’un tiers (sauf autorisation d’un juge et selon les dispositions de l’ordonnance émise à cet effet).

Il ne possède pas la force exécutoire que prévoit, entre autre, les articles 565 et 582 C.p.c. À cet effet, il ne peut utiliser les services d’un serrurier afin de pénétrer à l’intérieur d’une unité de condo et/ou utiliser la force nécessaire afin d’entrer quand le consentement du copropriétaire n’est pas donné.

Toutefois, il peut constater d’une partie commune l’allée et venue de personnes qui pénètrent à l’intérieur d’une unité de condo qui exploite une entreprise alors que la déclaration de copropriété l’interdit.

De plus, il peut constater l’inachèvement des travaux sur une partie commune et tous les dégâts d’eau ou autres provoqués par un copropriétaire ou son locataire à une partie commune.

 

François Taillefer, h.j., Adm.A.

 

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François TAILLEFER
Chroniqueur
François TAILLEFER