La Loi française « CLIMAT ET RESILIENCE » provoque un débat passionné parmi les professionnels immobiliers et le public concernés soit les propriétaires de logements d’habitation qui ne sont pas suffisamment isolés et vont être interdits de location ou d’augmentation de loyer tant que les travaux ne sont pas faits.
Les transactions immobilières se bloquent.
Les propriétaires cherchent à se débarrasser de leurs logements, mais attention !
Les agents immobiliers doivent appliquer une décote, car ils ne peuvent plus les vendre, En effet, qui va acheter une passoire énergétique qui ne pourra plus se louer, dont on ne pourra pas augmenter les loyers, sauf à faire d’importants travaux intérieurs ou sur le bâtiment ?
Des « passoires énergétiques » ? de quoi s’agit-il ?
Les propriétaires de ces logements d’habitation seront à terme obligés de faire des travaux de mise aux normes de leur logement énergivore pour faire baisser la facture énergétique et les émissions de gaz à effet de serre.
Comment en est-on arrivé là ?
Les biens immobiliers français d’habitation sont classés en « étiquette énergétique » A B C D E F G après la réalisation par un diagnostiqueur accrédité d’un « DPE » (Diagnostic de Performance Energétique). Un logement « A » le situe dans la fourchette haute et « G » est désastreux : une vraie « passoire énergétique » avec de fortes charges de copropriété d’énergie, car l’immeuble et donc le logement ne sont pas isolés, la chaudière obsolète, etc…
Le calcul des déperditions et le classement du logement et de l’immeuble sont faits par rapport à des kWh heure/an/m2. Selon la loi CLIMAT, Les logements classés G, F, E ne peuvent plus être loués en fonction d’un échéancier fixé par la Loi (respectivement 2023 pour les G, 2025 pour les F, 2028 pour les E, 2034 pour les D). Aucune augmentation des loyers n’est permise pour les G depuis le 1/1/23 et ils ne peuvent plus être loués au renouvellement du bail.
Comment peuvent-ils encore être vendus ?
Aucune amende n’est encourue pour les fraudeurs, mais le Juge, saisi par un locataire pourra ordonner des travaux et/ou baisser les loyers !... Les agents immobiliers sont consternés par ces mesures, eux qui souffrent déjà du fort ralentissement des mises en chantier et des octrois restreints de crédits immobiliers que ce soit aux promoteurs ou aux clients en raison de l’inflation. Pour l’instant ne sont concernés que les logements d’habitation. Les immeubles commerciaux font l’objet d’une autre réglementation moins contraignante, car ils ne sont soumis pour l’instant qu’à l’obligation d’audits énergétiques parce que l’on appelle « le décret tertiaire ».
Panique à bord pour les propriétaires des logements d’habitation !
Le gouvernement s’est empêtré dans une logique environnementaliste. D’une part, lutter contre le réchauffement climatique demandé par les Directives européennes et les écologistes, car l’on sait que les bâtiments consomment 43% de l’énergie et émettent 25% des gaz à effet de serre. Mais il existe une autre logique à laquelle il n’a pas sans doute suffisamment pensé disent les détracteurs de la loi CLIMAT :
Le marché, la dure réalité du marché !
La crise immobilière due à l’inflation avec des taux de crédit qui s’envolent, la guerre en Ukraine, l’incertitude au Moyen Orient pénalisent les acheteurs qui accèdent difficilement au crédit dont le taux est trop élevé. Les marges des promoteurs recourant au crédit se réduisent à tel point que les ventes d’appartements sont en chute libre : - 30% au 4e trimestre 2023…
Et cette Loi CLIMAT qui perturbe en plus le marché…
Rien que dans la région Ile de France, 2,3 millions de logements ont une étiquette E, F ou G, soit 45% du parc immobilier. Les propriétaires concernés devront faire face à terme à 19 000 euros de travaux d’isolation en moyenne par logement que ce soit en maison individuelle ou en copropriété. On comprend que les syndicats des agents immobiliers transactionnaires ou des propriétaires essaient de faire fléchir les pouvoirs publics… Les propriétaires cherchent à se débarrasser de leurs logements, mais qui va acheter un appartement soumis à des restrictions d’augmenter les loyers ou de pouvoir louer ? Du coup les propriétaires des logements pénalisés ne vendent plus, les agents immobiliers pleurent et la révolte gronde. Et l’on entend, c’est nouveau, une petite musique de « contre- révolution écologique » des propriétaires exaspérés du style : « L’environnement ? Une machine infernale ! »
Panique à bord chez les agents immobiliers !
Les agents immobiliers sont à la manœuvre pour leurs clients propriétaires, mais ils ne peuvent plus vendre « les passoires énergétiques D E F G », sauf à imaginer avec leurs avocats des solutions qui peuvent encore exister. En effet, tout dépend des contraintes architecturales des bâtiments qui ne peuvent tous être isolés. Un décret publié cet été assouplit parfois les exigences légales, mais la porte est étroite, trop étroite pour les bailleurs. La crainte est évidemment qu’au renouvellement du bail (en général tous les 3 ans) le locataire exige le respect du seuil de décence énergétique. Des procédures devant les tribunaux en masse sont attendues y compris contre les professionnels immobiliers qui pourraient mal conseiller leurs clients dans les méandres de la Loi et son Décret.
Panique à bord chez les syndics-gestionnaires de copropriété !
Les agents immobiliers se tournent vers leurs confrères syndics-gestionnaires de copropriété : Faire de l’isolation intérieure est compliqué, car on va perdre de la surface.
Alors les agents immobiliers et leurs clients se tournent vers leurs confrères syndics-gestionnaires des copropriétés pour réaliser des travaux d’isolation extérieure sur le bâtiment. En copropriété, que faire quand on sait que les travaux d’économies d’énergie sur le bâtiment à isoler sont tellement onéreux qu’il faut les faire en moyenne en 3 ans à condition que l’argent soit là et qu’ils soient possibles à la suite d’un audit complet du bâtiment. Les syndics-gestionnaires sont donc aussi à la manœuvre, car les bailleurs et leurs agents immobiliers leur demandent de mettre à l’ordre du jour des assemblées générales de copropriété l’exécution de travaux de mise aux normes énergétiques pour pouvoir continuer de louer ou d’augmenter les loyers (pour les G), ou alors ils seront contraints de vendre avec de fortes décotes…ou plus du tout… Une rénovation énergétique de copropriété coûte très cher, même avec les aides de l’État et c’est donc très long.
Beaucoup d’immeubles ne peuvent pas se permettre une rénovation énergétique, soit qu’ils sont des bâtiments historiques et donc protégés par la loi soit que la structure de la façade ne permet pas une isolation thermique sur le plan architectural. Il se peut aussi que la copropriété n’ait pas les moyens de réaliser les travaux même avec des aides financières de l’État et de la Région que les professionnels immobiliers doivent aller chercher :
Un vrai parcours du combattant !
Le dernier Décret de petit assouplissement pris cet été par le gouvernement prouve qu’il a conscience de l’étau dans lequel il se trouve. Il s’aperçoit que parfois les propriétaires de logements qui les habitent ne se sentent pas concernés par la loi CLIMAT, car ils ne les louent pas et refusent donc de voter en assemblée générale de copropriété les travaux de mise aux normes énergétiques ! Et c’est le blocage des travaux de mise aux normes.
Ce sont les tensions entre les bailleurs et les propriétaires occupants. En France ce n’est pas le « conseil syndical » de l’immeuble qui décide, mais les copropriétaires en assemblées générales. Les remontées d’information des professionnels immobiliers ne sont pas bonnes quant aux affrontements entre copropriétaires concernés dans les assemblées générales. Or par définition un agent immobilier est pressé de vendre pour percevoir sa commission ainsi que le propriétaire pour se reloger ou profiter de l’argent de la vente ou tout simplement, car il en a besoin ! Le marché se bloque.
La fièvre monte chez les petits propriétaires !
Et voilà que les « petits copropriétaires » se mêlent à la révolte, ceux qui ont économisé toute leur vie pour s’acheter un petit appartement pour compléter leur retraite et ne pourront pas payer les travaux de mise aux normes, donc verront l’investissement immobilier ruiné, sauf à essayer de trouver des failles dans la Loi CLIMAT.
Un vrai casse-tête.
Emmenés par les agents immobiliers en crise, ils font aussi pression pour faire plier le gouvernement qui résiste en faisant prévaloir l’effet de la loi CLIMAT sur le réchauffement climatique et appelant à la solidarité collective.
Nous voilà bien !
Tiraillés entre notre responsabilité collective de donner à nos enfants et petits enfants une planète propre et vivable ou alors sacrifier un investissement immobilier souvent d’une vie et entraîner les agents immobiliers dans la difficulté, la déprime et le chômage coûteux pour la nation !
Comment sauver la planète de ses maux ?
Me Olivier Brane, avocat honoraire au Barreau de Paris