Date de publication: 13/03/2023

Inspection en bâtiment, rôle, devoirs et obligations du courtier immobilier

9 mars 2023 - Une des étapes importantes lors d’une transaction immobilière est évidemment l’inspection en bâtiment. Plusieurs personnes y ont intérêt mais aucune plus qu’un acheteur. Après l’inspection, l’acheteur reçoit le bilan de santé de l’immeuble qu’il projette d’acquérir. Regardons maintenant qui fait quoi et le cadre applicable.

Lorsqu’il est accompagné ou représenté par un courtier immobilier, l’acheteur est en droit de recevoir de ce courtier certaines recommandations, conformément aux obligations déontologiques de ce dernier. L’acheteur se tournera souvent vers son courtier pour choisir l’inspecteur. D’une certaine manière, le courtier participe donc au choix du professionnel en question qui formulera une opinion au bénéfice d’un acheteur. Ce choix revient de plein droit à l’acheteur par la pratique, par les règles de représentation mais également par l’interprétation et le libellé des formulaires obligatoires de l'Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) lorsque la transaction a lieu par l’entremise d’un courtier immobilier. La clause 8.1 de la promesse d’achat y fait notamment référence sous le titre de la rubrique 8 intitulée « INSPECTION PAR UNE PERSONNE DÉSIGNÉE PAR L’ACHETEUR ».

Quant aux obligations du courtier immobilier, la première consiste à recommander à l’acheteur de faire procéder à une inspection en bâtiment par un professionnel ou un inspecteur en bâtiment. Cette obligation est prévue l’article 81 du Règlement sur les conditions d’exercice d’une opération de courtage, sur la déontologie des courtiers et sur la publicité (ci-après désigné le RCE). De plus, dans le cas où l’immeuble est vendu sans garantie légale de qualité, aux risques et périls de l’acheteur, le courtier ne peut demeurer silencieux. Il doit même insister sur l’importance de faire procéder à l’inspection tel que nous l’apprend la jurisprudence.

La même disposition règlementaire fait en sorte que le courtier ne peut se limiter à un seul nom lorsqu’il est appelé à recommander un professionnel – un inspecteur – pour faire le travail. Une bonne pratique est de suggérer au moins trois noms. Le courtier doit aussi s’assurer que chacun des trois professionnels qu’il suggère répond aux 4 critères qui suivent :

1° Il détient une assurance responsabilité professionnelle contre les fautes, erreurs ou omissions;

2° Il utilise une convention de service d’inspection reconnue;

3° Il effectue ses inspections conformément à une norme de pratique de l’inspection en bâtiment reconnue;

4° Il remet un rapport écrit à la partie qui utilise ses services.

De plus, l’article 2 du RCE stipule que le courtier doit aussi éviter de se placer en situation de conflit d’intérêt en toute chose. La recommandation d’un inspecteur est plus que concernée par cette obligation. Ainsi, exclure un inspecteur en bâtiment ou un professionnel de l’inspection sur la base que ses rapports d’inspection sont trop volumineux, n’est pas acceptable.

C’est ce dont traitait un récent reportage présenté à Radio-Canada le 7 mars 2023 à l’émission LA FACTURE, où il était question d’un courtier qui excluait de son propre chef une inspectrice de sa liste de référence. Ce courtier allait même jusqu’à faire annuler des inspections de cette même inspectrice en raison de la longueur de ses rapports. Évidemment de tels agissements sont contraires à l’éthique et à la déontologie et passibles de sanctions disciplinaires. Cela pourrait même exposer le courtier fautif à une condamnation au civil en dommages-intérêts.

En quoi de tels agissements ne sont pas éthiques et déontologiques ? Le courtier doit non seulement éviter de se placer en conflit d’intérêt mais il doit aussi dans sa pratique faire preuve d’objectivité et, surtout, s’en tenir à son champ de compétence. Le courtier n’est pas inspecteur en bâtiment, technologue, architecte et encore moins ingénieur. Il a le devoir de demeurer dans son champ de compétence de courtier puisque l’expertise de l’inspecteur n’est nullement de son ressort. Considérant ce qui précède, comment pourrait-il se prononcer sur une opinion professionnelle d’un autre professionnel dont il ne détient ni la compétence propre ni l’expertise?

À ce jour le travail des inspecteurs en bâtiment n’est pas encadré. Lorsqu’ils y sont appelés, les tribunaux jouent tout de même un certain rôle de surveillance en appliquant les règles générales ordinaires en matière de responsabilité au Code civil du Québec. Ce régime tire à sa fin à titre de seul recours. Le projet de loi 16 présenté en 2019 intitulé Loi visant principalement l’encadrement des inspections en bâtiment (…) cherche notamment à établir des normes de pratiques uniformes en matière d’inspection en bâtiment. Il est ici question de la norme BNQ 3009-500. Pour l’instant elle n’est que connue mais elle deviendra obligatoire à compter du 1er octobre 2024.  Cette norme stipule qu’afin de pouvoir exercer à ce titre, les inspecteurs devront être titulaire d’un certificat délivré par la Régie du Bâtiment du Québec.

Est-ce que ces mesures seront favorables pour l’ensemble des intervenants du domaine de l’immobilier ? À suivre dans quelques années pour le verdict final!

 

Me Joël Charron LL.L, Avocat, courtier immobilier agréé et DA

Président, enseignant et formateur principal

Académie de formation immobilière du Québec (AFIQ)

www.afi-qc.ca

[email protected]

819.661.3148

 

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