Date de publication: 26/06/2019

L’assurance responsabilité civile des copropriétaires mise à mal par certains assureurs

26 juin 2019 — L’avocat émérite et secrétaire général du RGCQ, Yves Joli-Coeur, était de passage (pour une seconde fois en deux semaines) à la station radiophonique 98,5 FM, où l’attendait l’animatrice Isabelle Maréchal.

La semaine dernière, ce juriste était appelé à commenter un projet de modernisation réglementaire déposé par le ministère du Tourisme du Québec, qui veut mieux encadrer la location à court terme de type Airbnb. Cette semaine, il a entretenu l’auditoire à l’écoute d’un épineux problème lié à l’assurance responsabilité civile des copropriétaires.

 

Faute « directe »

Au cœur du débat se trouve une interprétation "obtuse" (selon Yves Joli-Coeur), par certains assureurs, de l’article 1074.2 du Code civil du Québec. Cela pourrait obliger un syndicat à assumer lui-même le paiement de sa franchise, même si un sinistre origine d’une partie privative. Cette franchise pourrait ne pas être remboursée par l’assureur du copropriétaire qui en serait le responsable, par exemple dans le cas d'un chauffe-eau ou d'une baignoire qui coule, à moins que le syndicat puisse faire la preuve que le copropriétaire a commis une faute « directe ».

Cette démarche impliquerait (généralement) d’intenter un recours judiciaire, ce qui contribuerait à engorger les tribunaux et pourrait, dans une certaine mesure, décourager plusieurs consommateurs d’acheter un condo. Tout cela en raison de "l'interprétation" d'un article de loi par certains assureurs, fait valoir Yves Joli-Coeur.   

L’article 1074.2 stipule que : « Les sommes engagées par le syndicat pour le paiement des franchises et la réparation du préjudice occasionné aux biens dans lesquels celui-ci a un intérêt assurable ne peuvent être recouvrées des copropriétaires autrement que leur contribution aux charges communes, sous réserve des dommages-intérêts qu’il peut obtenir du copropriétaire tenu de réparer le préjudice causé par sa faute. »

Concours de sémantique

Or, des compagnies d’assurance affirment que les termes « par sa faute » sont plus limitatifs qu’être « tenu responsable », ce qui donne lieu à un « concours de sémantique arbitraire pour se soustraire à leur obligation de payer », croit Yves Joli-Coeur. En pareille situation, le fardeau financier reviendrait à une collectivité de copropriétaires, qui devrait fouiller dans ses poches pour assumer la franchise au moyen d’une cotisation spéciale. Cette franchise peut parfois atteindre 10 000, 25 000, voire 50 000 dollars et plus.

Ce constat pourrait avoir comme effet de fragiliser considérablement la santé financière d’une copropriété. Et pour cause, puisque cette application inadéquate de l’article 1074.2, dans le domaine de l’assurance, « plongera certains syndicats de copropriétaires dans un déficit d’exploitation récurrent. Le législateur devra donc corriger le tir dans les plus brefs délais, afin que cet article de loi soit appliqué correctement », conclut Yves Joli-Coeur.

Pour écouter l’intégralité de l’entrevue donnée par Yves Joli-Coeur, on peut cliquer sur cet hyperlien.

Montréal, 26 juin 2019