30 novembre 2015 — Les copropriétés françaises en difficulté ne cessent d’augmenter depuis plusieurs années. Il est toutefois « impossible d’estimer leur nombre, faute de statistiques récentes », déclare Blanche Guillemot, directrice de l’Agence nationale de l’habitat, citée par le Journal Le Monde.
Les derniers chiffres datent de 2011. On estimait, alors, que 15,5 % des copropriétés étaient en difficulté en France. Ce pourcentage représente 1,13 million d’appartements, sur les huit millions que compte ce pays. Certains experts croient qu'un pourcentage plus élevé de copropriétés pourraient y être en difficulté.
Détérioriations multiples
Cette dégradation des immeubles détenus en copropriété prend diverses formes. Il peut s’agir de petits bâtiments situés en centre-ville et habités par des aînés. Ces derniers ne peuvent plus assumer leurs charges. Dans d’autres situations, on parle de grands ensembles construits dans les années 1960-1970. Ils comptent plusieurs centaines de lots.
Les premiers signes d’une copropriété en difficulté sont les suivants : multiplication des impayés, augmentation constante des charges, fournisseurs de produits et services payés systématiquement en retard, contrats qui ne sont jamais renégociés et dégradation des parties communes.
« Lorsque des travaux votés ne sont pas réalisés, cela signifie, généralement, que le syndic (gestionnaire de copropriété) n’a pas reçu suffisamment d’argent pour les lancer, ou qu’il a utilisé l’argent pour autre chose », relève Denys Brunel, président de la Chambre nationale des propriétaires.
Situation inquiétante
La moyenne du nombre de condos par immeuble, en France, est d'environ 20 unités. « Or, il faut s’inquiéter lorsque trois ou quatre copropriétaires y cumulent des retards de paiement représentant trois trimestres de charges. Cela indique qu’ils sont noyés et n’arriveront pas à remonter la pente », nous dit pour sa part Jean-François Buet, président de la FNAIM (Fédération nationale de l’immobilier).
Étant donné que la copropriété française traverse des moments difficiles, la loi ALUR (Accès au Logement et un Urbanisme Rénové) a prévu des mesures de renforcement. Adoptée le 24 mars 2014, cette loi oblige, notamment, la réalisation d’un audit technique afin que les copropriétaires puissent anticiper (à l’avance) les gros travaux à réaliser, ainsi que la constitution d’un fonds travaux pour planifier le financement des futures dépenses d’entretien majeur.
Par ailleurs, dans les copropriétés dont le seuil d’endettement atteint 25 % (ou 15 % pour les grands ensembles), leur syndic doit en saisir le tribunal de grande instance (TGI), lequel sélectionnera un mandataire qui agira comme administrateur judiciaire. Il sera chargé d’analyser la situation et d’y aller de recommandations pour redresser la situation. Dans les cas extrêmes, cette prise en charge peut aller encore plus loin.
Copropriétés en difficulté au Québec?
Tout cela nous rappelle que la France est en train d’apprendre de ses erreurs. "Le Québec doit également en tirer des leçons, car certaines copropriétés qui s’y trouvent pourraient, elles aussi, se retrouver en sérieuse difficulté", prévient l'avocat émérite et secrétaire général du RGCQ, Yves Joli-Coeur. Si cela devait se produire, le gouvernement serait fort probablement appelé à intervenir, afin d'éviter une crise dans le domaine de l'immobilier résidentiel.
Montréal, 30 novembre 2015
Source: Le Monde